FLAUBERT Gustave (1821-1880).

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FLAUBERT Gustave (1821-1880).
L.A.S. « G. », Nuit de samedi [3 juillet 1852], à Louise COLET ; 5 pages in-4, enveloppe avec cachet de cire rouge à son chiffre. Très belle et longue lettre d'amour à sa maîtresse, alors que Flaubert peine dans l'écriture de Madame Bovary. « Tes dernières lettres sont bien tristes pauvre chère Louise. Tu m'as l'air découragée. Ne baisse pas. Tu étais si bien il y a qque temps. J'aime à te savoir calme là-bas, pendant que je suis ici. - Il y a bien des moments où si je pouvais m'envoler vers toi, pr aller embrasser ta belle & bonne figure, quand je me l'imagine triste, et rêvant seule sur mille misères de la vie, je le ferais, va, et je m'en reviendrais. - Espère, espère, tout est là. Les voiles ne vont pas sans vent, les cœurs tombent quand le souffle leur manque. J'ai été bien affaissé toute cette semaine où j'ai fait à peu près une page. Comme j'ai envie que cette première partie soit achevée. J'ai presque la conviction que c'est trop long & pourtant je n'y vois rien à retrancher. Il y a tant de petites choses importantes à dire. - Depuis hier au soir pourtant, et surtout aujourd'hui ça va mieux. Le beau temps sans doute en est cause. Ce soleil m'a délecté, - et ce soir la lune. - Je me sens à l'heure qu'il est frais rajeuni »... Quant à Maxime DU CAMP, il « m'a répondu une lettre bonhomme & affligée. Je lui en ai renvoyé une autre du même tonneau (de vinaigre). Je crois qu'il sentira longtemps l'étourdissement d'un tel coup de poing et qu'il se le tiendra pr dit. Je suis très bon enfant jusqu'à un certain degré, jusqu'à une frontière (celle de ma liberté) qu'on ne passe pas. - Or comme il a voulu empiéter sur mon territoire le plus personnel, je l'ai recalé dans son coin & à distance. - Comme il me disait que l'on se devait aux autres, qu'il fallait s'aider, etc., que j'avais une mission et autres phrases, après lui avoir exprimé net que je me foutais radicalement de tout & de tous, j'ajoutais “Les autres se passeront donc de mes lumières. Je leur demande en revanche qu'ils ne m'empoisonnent pas de leurs chandelles” et de même encre pendant quatre pages. - Je suis un Barbare, j'en ai l'apathie musculaire, les langueurs nerveuses, les yeux verts et la haute taille. Mais j'en ai aussi l'élan, l'entêtement, l'irascibilité. Normands tous que nous sommes nous avons qque peu de cidre dans les veines. C'est une boisson aigre et fermentée et qui qqfois fait sauter la bonde »... Puis il parle de MUSSET : « le fonds de tout cela c'est la Pose ! - Pour la Pose tout sert, soi, les autres, le soleil, les tombeaux, etc. on fait du sentiment sur tout, et les pauvres femmes les trois quarts du temps y sont prises. C'est pr donner une bonne idée de lui qu'il te disait Essayez, j'ai échigné des Italiennes (laquelle idée d'Italiennes s'associe à celle de volcan, on voit toujours le Vésuve sous leur jupon. - Erreur ! l'Italienne se rapproche de l'Orientale - et est molle à la Fesse/Folle à la messe comme eût dit ce vieux Rabelais. - Mais n'importe c'est une idée reçue) tandis que le pauvre garçon ne peut seulement peut-être pas satisfaire sa blanchisseuse. - C'est pr paraître un homme à passions ardentes qu'il disait Moi, je suis jaloux, je tuerais une femme etc. - On ne tue pas les femmes on a peur de la Cour d'assises. Il n'a pas tué G. Sand. C'est pr paraître un lurron qu'il disait : Hier j'ai failli assommer un journaliste. Oui failli car on .../...l'a retenu. - C'est peut-être l'autre qui l'eût assommé. C'est pr paraître un savant qu'il disait Je lis Homère comme Racine. Il n'y a pas à Paris vingt personnes qui en soient capables. - Et de ceux qui en font leur métier. Mais quand on s'adresse à des gens qui n'ont jamais étudié le susdit grec, on vous croit. Cela me rappelle ce bon Gautier me disant “Moi je sais le latin comme on le savait au M. âge”, et le lendemain je trouve sur sa table une traduction de Spinosa - “Pourquoi ne le lisez-vous pas dans l'original - ah c'est trop difficile”. Comme on ment ! Comme on ment en ce bas monde. Bref les bras tendus aux arbres et les regrets dithyrambiques de sa jeunesse perdue me semblent partir du même sac. - Elle sera émue, elle voudra (se dira-t-elle) me sauver me relever. Elle y mettra son orgueil. Les femmes à prétentions fortes se laissent prendre à ces sophismes, et l'on blague l'on blague les larmes aux yeux. - Enfin, comme bouquet du feu d'artifice, éblouissement de la débauche, les démons de feu (pr dire les garces) etc., etc. - mais j'ai donné dans tout cela aussi moi ! à 18 ans ! J'ai cru également que l'alcool et le bordel inspiraient. J'ai qqfois comme ce gd homme mangé en un seul coup beaucoup d'argent à des processions mythologiques, mais j'ai trouvé tout cela aussi bête que le reste - & aussi vide. Il faut être un piètre homme pr s'y tenir. On en est bien vite rebattu. Si je suis sous le rapport vénérien un homme si sage c'est que j'ai passé de bonne heure par une débauche supérieure à mon âge et intentionnellement afin de savoir. - Il y a p
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